L’initiative visant à créer une assemblée nationale acadienne arrive à point nommé. Les statu quo provinciaux et Atlantique en matière d’organisations et de pouvoir politico-économique ne sont plus suffisants pour assurer la pérennité et l’épanouissement du peuple acadien et de ses communautés acadiennes de l’Atlantique. Il faut que ça change, et ces changements doivent émaner de nos communautés elles-mêmes.
Toute idée de regroupement des provinces atlantiques laisse perplexe. Comme communautés acadiennes en situations minoritaires, il est à se demander si un tel regroupement contribuerait à un renforcement ou à un affaiblissement comme peuple acadien de l’Atlantique. La SNA est actuellement l’outil politique privilégié de rassemblement des communautés acadiennes de l’Atlantique, son principal outil organisationnel de peuple. Mais comme pour ses composantes provinciales, il faut se questionner sérieusement à savoir si cet outil national et ses composantes provinciales sont suffisants pour assurer notre existence dans le temps.
Avant de réviser nos structures actuelles de représentation, tout mouvement vers du changement doit tenir compte de deux orientations et considérations de base. Tout regroupement Atlantique doit s’assurer que la portée des législations actuelles les plus progressistes et favorables à l’épanouissement d’une de nos communautés s’applique à l’avenir à l’ensemble de nos communautés provinciales. Ainsi, par exemples, la loi sur l’égalité des communautés linguistiques, avec le droit à des institutions homogènes, du Nouveau-Brunswick ou encore la meilleure loi sur l’éducation qu’est celle de la Nouvelle-Écosse devront s’appliquer à l’ensemble des quatre provinces de l’Atlantique.
Deuxièmement, il faudrait que l’Acadie du Nouveau-Brunswick arrête de se comporter comme le nombril acadien du monde, et fasse montre de plus d’empathie et de solidarité avec les autres communautés acadiennes de l’Atlantique. Pour ce faire, le Nouveau-Brunswick doit à la fois ouvrir ses ornières tout en continuant à gruger au sein de sa province le maximum de pouvoirs, qui plus tard, pourra s’appliquer à la faveur de toutes nos communautés de l’Atlantique.
Pour procéder à de grands changements, ça implique au départ que l’on se dote de grandes idées. On doit par exemple bannir de notre vocabulaire les appellations de « minorités » ou de « communautés minoritaires » puisque nous sommes des communautés égalitaires en situation minoritaire. On doit privilégier le concept d’égalitaire quand on traite avec l’autre communauté égalitaire qu’est la communauté anglophone.
De plus, on doit se rapprocher de la communauté fransaskoise dans la façon de traiter leurs élus de leur association provinciale. On doit arrêter de traiter nos élus sur les conseils d’administration de nos associations provinciales ou encore de la SNA comme de simples élus de deuxième ordre, mais bel et bien comme des députés communautaires. On est trop souvent victime du peu d’estime de soi comme individu, comme communauté et peuple.
Je suis donc très sensible et favorable à l’initiative face à une éventuelle Assemblée nationale de l’Acadie. Je souhaite que l’on profitera des débats organisés dans le cadre du CMA 2019 pour semer des graines de changement. Nos statu quos nous tuent : il n’y a rien à perdre à scruter l’imaginaire!
Jean-Marie Nadeau, journaliste, auteur et patriote acadien, Secrétaire général de la SNA (1984-1989), président de la SANB (1993-94 et 2008-2013), membre de l’Ordre national du Mérite de France (2004), lauréat de la Médaille Léger-Comeau (2014)